Sujet du Bac Philo Série L : Littéraire (Coef. 7)
1er sujet : Est-il possible d’échapper au temps ?
2ème sujet : À quoi bon expliquer une oeuvre d’art ?
3ème sujet : Expliquer le texte suivant :
Pour savoir ce qu’est une loi de la nature, il faut que nous ayons une connaissance de la nature, car ces lois sont exemptes d’erreur et ce sont seulement les représentations que nous en avons qui peuvent être fausses. La mesure de ces lois est en dehors de nous : notre connaissance n’y ajoute rien et ne les améliore pas. Il n’y a que la connaissance que nous en avons qui puisse s’accroître. La connaissance du droit est, par certains côtés, semblable à celle de la nature, mais, par d’autres côtés, elle ne l’est pas. Nous apprenons, en effet, à connaître les lois du droit telles qu’elles sont données. C’est plus ou moins de cette façon que le citoyen les connaît et le juriste qui étudie le droit positif1 s’en tient, lui aussi, à ce qui est donné. Toutefois la différence consiste en ceci que, dans le cas des lois du droit, intervient l’esprit de réflexion et la diversité de ces lois suffit à nous rendre attentifs à ce fait que ces lois ne sont pas absolues. Les lois du droit sont quelque chose de posé, quelque chose qui provient de l’homme. La conviction intérieure peut entrer en conflit avec ces lois ou leur donner son adhésion. L’homme ne s’en tient pas à ce qui est donné dans l’existence, mais il affirme, au contraire, avoir en lui la mesure de ce qui est juste. Il peut sans doute être soumis à la nécessité et à la domination d’une autorité extérieure, mais il ne l’est pas comme dans le cas de la nécessité naturelle, car son intériorité lui dit toujours comment les choses doivent être, et c’est en lui-même qu’il trouve la confirmation ou la désapprobation de ce qui est en vigueur. Dans la nature, la vérité la plus haute est qu’il y a une loi ; cela ne vaut pas pour les lois du droit où il ne suffit pas qu’une loi existe pour être admise.
HEGEL, Principes de la philosophie du droit (1820)
Sujet du Bac Philo Série ES : Economique et sociale (Coef. 4)
Sujet 1 : La morale est-elle la meilleure des politiques ?
Sujet 2 : Le travail divise-t-il les hommes ?
Sujet 3 : Expliquer le texte suivant :
Nous avons le libre arbitre, non pas quand nous percevons, mais quand nous agissons. Il ne dépend pas de mon arbitre de trouver le miel doux ou amer, mais il ne dépend pas non plus de mon arbitre qu’un théorème proposé m’apparaisse vrai ou faux ; la conscience n’a qu’à examiner ce qui lui apparaît. Lorsque nous décidons de quelque chose, nous avons toujours présentes à l’esprit ou bien une sensation ou
une raison actuelles, ou tout au moins un souvenir actuel d’une sensation ou d’une raison passées ; bien qu’en ce dernier cas nous soyons souvent trompés par l’infidélité de la mémoire ou par l’insuffisance de l’attention. Mais la conscience de ce qui est présent ou de ce qui est passé ne dépend nullement de notre arbitre. Nous ne reconnaissons à la volonté que le pouvoir de commander à l’attention et à l’intérêt ; et ainsi, quoiqu’elle ne fasse pas le jugement en nous, elle peut toutefois y exercer une influence indirecte. Ainsi il arrive souvent que les hommes finissent par croire ce qu’ils voudraient être la vérité, ayant accoutumé leur esprit à considérer avec le plus d’attention les choses qu’ils aiment ; de cette façon ils arrivent à contenter non seulement leur volonté mais encore leur conscience.
LEIBNIZ, Remarques sur la partie générale
des Principes de Descartes (1692)
Sujet du Bac Philo Série S : Scientifique (Coef. 3)
Sujet 1 : La pluralité des cultures fait-elle obstacle à l’unité du genre humain ?
Sujet 2 : Reconnaître ses devoirs, est-ce renoncer à sa liberté ?
Sujet 3 : Expliquer le texte suivant :
La science a beaucoup d’ennemis déclarés, et encore plus d’ennemis cachés, parmi ceux qui ne peuvent lui pardonner d’avoir ôté à la foi religieuse sa force et de menacer cette foi d’une ruine totale. On lui reproche de nous avoir appris bien peu et d’avoir laissé dans l’obscurité incomparablement davantage. Mais on oublie, en parlant ainsi, l’extrême jeunesse de la science, la difficulté de ses débuts, et l’infinie brièveté du laps de temps écoulé depuis que l’intellect humain est assez fort pour affronter les tâches qu’elle lui propose. Ne commettons-nous pas, tous tant que nous sommes, la faute de prendre pour base de nos jugements des laps de temps trop courts ? Nous devrions suivre l’exemple des géologues. On se plaint de l’incertitude de la science, on l’accuse de promulguer aujourd’hui une loi que la génération suivante reconnaît pour une erreur et remplace par une loi nouvelle qui n’aura pas plus longtemps cours. Mais ces accusations sont injustes et en partie fausses. La transformation des opinions scientifiques est évolution, progrès, et non démolition. Une loi, que l’on avait d’abord tenue pour universellement valable, se révèle comme n’étant qu’un cas particulier d’une loi (ou d’une légalité) plus générale encore, ou bien l’on voit que son domaine est borné par une autre loi, que l’on ne découvre que plus tard ; une approximation en gros de la vérité est remplacée par une autre, plus soigneusement adaptée à la réalité, approximation qui devra attendre d’être perfectionnée à son tour. Dans divers domaines, nous n’avons pas encore dépassé la phase de l’investigation, phase où l’on essaie diverses hypothèses qu’on est bientôt contraint, en tant qu’inadéquates, de rejeter. Mais dans d’autres nous avons déjà un noyau de connaissances assurées et presque immuables.
FREUD, L’Avenir d’une illusion (1927)
Sujet du Bac Philo Séries Technologique (Coef. 2)
Toutes séries sauf TMD et STHR
Sujet 1 : Seul ce qui peut s’échanger a-t-il de la valeur ?
Sujet 2 : Les lois peuvent-elles faire notre bonheur ?
Sujet 3 : Expliquer le texte suivant :
Le fait qu’on ne voit aucune thèse qui ne soit débattue et controversée1 entre nous, ou
qui ne puisse l’être, montre bien que notre jugement naturel ne saisit pas bien clairement ce
qu’il saisit, car mon jugement ne peut pas le faire admettre par le jugement de mon semblable :
ce qui est le signe que je l’ai saisi par quelque autre moyen que par un pouvoir naturel qui
serait en moi et en tous les hommes.
Laissons de côté cette confusion infinie d’opinions que l’on voit parmi les philosophes
eux-mêmes, et ce débat perpétuel et général sur la connaissance des choses. On a tout à fait
raison, en effet, d’admettre que sur aucune chose les hommes – je veux dire les savants les
mieux nés, les plus capables – ne sont d’accord, pas même sur le fait que le ciel est sur notre
tête, car ceux qui doutent de tout doutent aussi de cela ; et ceux qui nient que nous puissions
comprendre quelque chose disent que nous n’avons pas compris que le ciel est sur notre tête ;
et ces deux opinions sont, par le nombre, incomparablement les plus fortes.
Outre cette diversité et cette division infinies, par le trouble que notre jugement nous
donne à nous-mêmes et par l’incertitude que chacun sent en lui, il est aisé de voir que ce
jugement a son assise bien mal assurée. Comme nous jugeons différemment des choses !
Combien de fois changeons-nous d’opinions ! Ce que je soutiens aujourd’hui et ce que je crois,
je le soutiens et le crois de toute ma croyance ; toutes mes facultés et toutes mes forces
empoignent cette opinion et m’en répondent sur tout leur pouvoir. Je ne saurais embrasser
aucune vérité ni la conserver avec plus de force que je ne fais pour celle-ci. J’y suis totalement
engagé, j’y suis vraiment engagé ; mais ne m’est-il pas arrivé, non pas une fois, mais cent,
mais mille, et tous les jours, d’avoir embrassé quelque autre opinion avec ces mêmes
instruments, dans ces mêmes conditions, opinion que, depuis, j’ai jugée fausse ?
MONTAIGNE, Les Essais (1580)